UFC BJJ Road to the Title : Premier bilan après 4 épisodes

Quatre épisodes, et déjà un tollé. UFC BJJ Road to the Title devait marquer l’entrée triomphale du jiu-jitsu dans l’univers du divertissement grand public. La réalité ? Un cocktail détonnant entre moments de grâce technique et choix de production qui font grincer des dents.
Nous avons décortiqué chaque épisode, analysé les retours de la communauté, et le constat est sans appel : ce programme divise. D’un côté, des combats de qualité indéniable avec des grapplers de niveau mondial. De l’autre, des décisions de casting qui laissent perplexe et une production qui peine à convaincre.
Isaac Doederlein classé 8e au classement alors qu’il est champion du monde ? Rerrison Gabriel comme coach face à Mikey Musumeci ? Andrew Tackett qui soumet des inconnus en 2 minutes ? Autant de choix qui alimentent les débats et soulèvent une question fondamentale : l’UFC a-t-elle trouvé la formule magique pour démocratiser le grappling, ou sommes-nous face à un rendez-vous manqué pour le JJB ?
Le concept : TUF version grappling
16 grapplers, 2 équipes, un objectif. L’UFC a recyclé la formule TUF en remplaçant les gants par les kimonos. Sur le papier, ça sonne bien. Dans les faits, c’est plus compliqué.
Le casting impressionne sur certains aspects. Andrew Tackett, Gianni Grippo, Josh Cisneros, Isaac Doederlein : des noms qui font vibrer n’importe quel fan de grappling. Plusieurs médaillés ADCC, champions du monde IBJJF, bref du très haut niveau technique. Jusqu’ici, tout va bien.
Le format divise les athlètes en deux catégories de poids : légers et welters. Chaque équipe est menée par un coach qui se battra en finale pour le titre inaugural de “Champion UFC BJJ”. L’idée paraît séduisante, mais c’est là que les premiers problèmes surgissent.
Mikey Musumeci d’un côté, légitime par ses multiples titres mondiaux. Rerrison Gabriel de l’autre, choix qui interroge dès le départ. Entre un phénomène reconnu mondialement et un jeune Brésilien peu connu en no-gi, l’équilibre semble rompu avant même le premier combat. 🤔
Nous avons donc un plateau technique solide, un format éprouvé, mais des choix de casting qui sèment déjà le doute. La suite nous dira si cette alchimie fonctionne ou si l’UFC a sous-estimé les spécificités du grappling moderne.
Ce qui marche malgré tout
Soyons honnêtes : les matchs sauvent le spectacle. Malgré tous les défauts de production, la qualité technique reste au rendez-vous. Les quatre premiers épisodes ont livré des combats engagés, avec des soumissions spectaculaires et des échanges tactiques de haut vol.
L’épisode 2 illustre parfaitement cette qualité. Le duel Doederlein vs Krikorian nous a offert quinze minutes d’intensité pure, avec des attaques de jambes techniques et une bataille de positions constante. Même si le système de rounds divise, l’action reste captivante.
Le format “pit” fonctionne à merveille. Cet octogone adapté au grappling, avec ses bords arrondies, intensifie l’action. Plus de sorties de tapis, plus de reset, juste du grappling pur. Visuellement, c’est réussi et ça change agréablement des traditionnels tatamis rectangulaires. 🔥
Le game plan de certains coachs impressionne aussi. L’épisode 3 a révélé toute la dimension stratégique du coaching moderne. Mikey avait minutieusement étudié les faiblesses de l’adversaire de Davis, ciblant spécifiquement sa jambe droite. Cette préparation tactique s’est avérée payante et montre l’évolution du grappling de haut niveau.
L’exposition médiatique reste inédite. Pour la première fois, le JJB bénéficie de la machine promotionnelle UFC. Diffusion quotidienne, production aux standards internationaux, visibilité mondiale : une opportunité unique pour toucher un public plus large.
Ces points positifs suffisent-ils à compenser les ratés ? Pas sûr, mais au moins le spectacle reste regardable quand l’action démarre.
Les failles béantes du programme
Passons aux choses qui fâchent. Le choix des coachs relève de l’incompréhension totale. Si Mikey Musumeci justifie sa présence par ses multiples titres mondiaux, Rerrison Gabriel pose question. Ce jeune Brésilien manque cruellement d’expérience en no-gi et de charisme télévisuel.
Sa barrière linguistique limite drastiquement ses interventions. On se retrouve avec des encouragements basiques du type “Try submit !” face à des analyses tactiques poussées. La situation devient surréaliste quand on réalise que la moitié de son équipe possède un palmarès plus étoffé que le sien. Andrew Tackett ou Gianni Grippo auraient été des choix autrement plus logiques.
Les mismatches évidents agacent. L’épisode 1 a donné le ton : Andrew Tackett, phénomène du grappling moderne, face à Aaron Wilson, combattant relativement inconnu. Résultat prévisible : soumission en moins de deux minutes. Le spectacle était garanti, l’intérêt sportif discutable. 😬
Isaac Doederlein classé 8e du classement alors qu’il est champion du monde en titre ? Cette aberration illustre parfaitement l’approche UFC : privilégier le show à l’équité sportive.
La production déçoit pour des standards UFC. Montage hasardeux avec des coupures en pleine phrase, timer de match masqué pour dissimuler le montage, interviews hachées. Pour une organisation réputée pour sa qualité technique, ces maladresses surprennent.
Le format TUF recyclé sans adaptation montre ses limites. Les séquences de vie commune manquent d’authenticité, et on sent le forcing permanent.
Les révélations croustillantes de production
L’illusion du direct s’effrite rapidement. Contrairement à ce que suggère le montage, l’intégralité des combats a été filmée en une seule journée. Les séquences de maison, d’entraînement et de vie commune ? Toutes réalisées en amont pour créer une chronologie artificielle.
Cette révélation explique certaines bizarreries. La fatigue visible de certains compétiteurs, les incohérences narratives, et surtout cette impression de précipitation qui transpire dans certains épisodes.
Claudia Gadelha, en charge des événements de grappling UFC, revendique avoir “parcouru le monde” pour recruter les meilleurs. Pourtant, le casting reste très majoritairement américain. Une recherche mondiale qui s’arrête visiblement aux frontières US.
Les spoilers involontaires amusent. Dès le premier épisode, l’écran géant affiche accidentellement les graphiques des demi-finales. Autant dire que les surprises sportives se limitent au strict minimum. 😅
Le timer masqué révèle la stratégie éditoriale. L’UFC cache délibérément l’horloge pendant les combats pour pouvoir éditer librement sans que les spectateurs remarquent les coupures temporelles. Malin, mais ça trahit une approche purement divertissement.
L’over-coaching de Mikey pose question. Ses interventions incessantes pendant les matchs révèlent parfois la stratégie à l’adversaire. Un style “jeu vidéo” qui agace autant qu’il instruit, transformant les combats en sessions de commentary live.
Ces coulisses montrent un programme pensé d’abord pour le spectacle, avec une authenticité sportive qui passe au second plan. Pas forcément mal, mais il faut le savoir.
Le vrai débat : bien ou mal pour le sport ?
Ici, les avis se fracturent. D’un côté, ceux qui voient dans UFC BJJ une opportunité historique pour le grappling. De l’autre, ceux qui craignent que cela nuise à l’avenir du sport.
Les arguments pour pèsent lourd. Le jiu-jitsu professionnel souffre d’un problème de financement chronique. Rares sont les grapplers qui vivent décemment de leur sport. L’UFC apporte des moyens financiers, une visibilité mondiale et une légitimité que peu d’organisations peuvent offrir.
L’exposition médiatique change la donne. Pour la première fois, le grappling bénéficie d’une plateforme grand public avec diffusion quotidienne. Cette visibilité peut attirer de nouveaux pratiquants et investisseurs dans l’écosystème.
Mais les risques sont réels. L’UFC a historiquement tendance à monopoliser les talents et à dicter les règles du marché. Les contrats d’exclusivité limitent déjà les opportunités des athlètes avec d’autres promotions comme WNO ou CJI.
La crainte d’une dénaturation du sport plane. Le format privilégie le spectacle à l’authenticité, avec des mismatches assumés et des dramaturges forcées. Le grappling risque-t-il de perdre son âme dans cette quête de divertissement ? 🤯
Le problème de fond reste entier : le jiu-jitsu est-il vraiment télégénique ? Même les pratiquants regardent peu les compétitions professionnelles. Convaincre le grand public représente un défi autrement plus complexe.
Cette tension entre tradition et modernisation définira l’avenir du grappling médiatique. UFC BJJ n’est que le début de cette nouvelle phase.
Ce qu’il faut retenir et ce qui nous attend
Andrew Tackett fait figure de favori écrasant. Son niveau technique surclasse visiblement la majorité des participants. Le voir soumettre Aaron Wilson en deux minutes a donné le ton : peu d’athlètes semblent capables de le défier sérieusement.
Isaac Doederlein intrigue malgré son classement aberrant. Champion du monde en gi, sa transition vers le no-gi sera scrutée de près. Les teasers suggèrent des problèmes physiques à venir, avec des images où il sort sur civière qui alimentent déjà les spéculations.
Le système de rounds divise. Contrairement aux formats traditionnels de grappling, cette approche “10-point must” avantage certains styles de jeu. Les leglockers peuvent scorer sans réellement menacer, créant des victoires discutables.
La question d’une saison 2 se pose déjà. Les retours mitigés et la production amateur laissent planer le doute sur la pérennité du format. L’UFC investira-t-elle massivement pour corriger les défauts ou abandonnera-t-elle après cette expérimentation ?
Les autres promotions observent attentivement. WNO, CJI et ADCC voient arriver un concurrent de taille avec des moyens financiers colossaux. Cette concurrence pourrait dynamiser l’ensemble de l’écosystème ou l’asphyxier selon l’approche UFC.
Notre avis ? Ce programme représente un laboratoire pour l’avenir du grappling télévisé. Imparfait mais nécessaire, il pose les bases d’une réflexion sur la spectacularisation du jiu-jitsu. Le grappling a gagné en visibilité, et c’est déjà un début prometteur malgré les ratés évidents. Et vous, quel est votre avis ?